Se loger pour trouver tranquillité, trouver refuge hors du monde cassant –
Se loger, se lover, au creux, au cœur, faire corps avec l’autour, l’autre, les
autres –
Attends, j’saisis pas là, c’est un appel à loger, à s’ranger dans c’te société figée ?
Normalité, cadre étouffant, frontières de la honte en béton sanglant,
endiguant les flux par peur de débordement –
On s’fait pas un peu emmurer là ?
Ok, on remanie, on nuance –
Encore –
Murs en terre, toits en palme, mains dans la glaise –
Construire pour se construire –
Faire forme avec, se fondre dans –
Invitation à laisser faire l’hybridation, nécessaire mélanges, altérités
recherchées –
Campements pirates dans rues en travaux, squats, habitats librement
ouverts pour entre-voir l’ailleurs –
Ici, humain·es habitent, dissout·es dans l’espace : ielles ne sont pas facilement
visibles mais si vous tendez l’oreille, sous l’arbre à palabre, leurs voix s’entre-
mêlent au bruissement des feuilles –
Vendredi 12. 18h30. Place de Melle. Nous arrivons par petites grappes à un rassem-blement appelé par des élu·es localaux « contre toutes les violences » qui pourraient
avoir lieu pendant les manif-actions à venir.
Depuis la veille, nous villageois·e·s de l’eau, échangeons, conversons et prenons
le temps de nous accorder sur quoi faire : on y va ou pas ? On fait un pot de l’ami-
tié ? On amène le dialogue qu’ils nous refusent ? Après l’AG, les discussions per-
durent auprès du feu, et puis c’est décidé : on y va et on chantera Les voleurs d’eau !
Et donc, au jour J : fin de la lecture du communiqué de presse par le président de la
communauté de commune, la brochette d’élu·es derrière lui. Irruption de la Mar-
seillaise par un gars du public, ça suit mollement. Notre groupe lance : « Moratoire !
moratoire ! » avant que le chant s’élève. Et puis, les discussions partent en tous sens.
On en débriefe au Village après le dîner.
Pour certain·e·s, c’est une réussite, l’entente a pu se faire ; pour d’autres, c’est la prise
de conscience que parler à nos adversaires n’est pas chose aisée, que parfois on ne
peut qu’essuyer du mépris, de la violence, qu’on n’était finalement pas préparé·es à de telles éventualités. Faire un retour collectif, c’est important pour visibiliser les vécus de chacun·e et faire une histoire commune.
Extérioriser, papoter après l’AG, chanter. Prendre soin de nous comme on peut,
comme on veut.